rencontre - Julien Montarros
- Par brasseur-vansnick
- Le 06/10/2021
- Dans infos
Rencontre avec un passionné
Julien Montarros, président de la troupe Le Théâtre Arrive
Depuis décembre 2020, nous sommes en contacts réguliers avec Le Théâtre Arrive, une association de théâtre amateur basée en Isère (France). Julien Montarros est président de la troupe « cette année encore ».
Malgré les difficultés, Le Théâtre Arrive poursuit ses activités. La troupe prépare pour le mois de novembre une comédie grinçante de Jean Anouilh, La Culotte, ainsi qu’un festival rassemblant plusieurs troupes de théâtre de la région. Nous vous proposons de faire plus ample connaissance avec Julien Montarros, le président.
Julien, comment es-tu devenu président de la troupe ?
Le Théâtre Arrive est une association qui a été constituée en 2012. Au départ, il y avait cinq comédiens avec un spectacle créé au sein d’une autre structure. Comme nous n’avions pu jouer que deux fois, nous étions frustrés. Deux d’entre nous ont lancé l’idée de créer une nouvelle association pour reprendre les représentations. J’ai suivi le mouvement mais quand on s’est réunis pour rédiger les statuts, personne n’avait réellement l’intention d’assumer un poste à responsabilités. Voilà comment je me suis retrouvé à la présidence. Un peu par hasard. Souvent, je dis que je suis président pour une durée d’un an. Lors de chaque assemblée générale, on revote… Jusqu’ici, j’ai toujours été réélu.
Cette question du nombre de représentations - qui a mené à la création de la troupe - reste très importante pour toi ?
Oui. Mon objectif, c’est toujours de jouer au moins cinq fois chaque spectacle. Bien sûr, ça n’a pas toujours été faisable. C’est plus compliqué pour les grandes distributions. En revanche, on est allés au-delà de cinq représentations pour certains spectacles. Le record, c’est Mélange caustique, un duo que j’avais créé en 2010 avec un ami. Quand on a lancé Le Théâtre Arrive, il nous fallait accumuler un peu de trésorerie. Pour louer des salles, par exemple. Or, comme nous avions nous-mêmes écrit les textes de ce duo, il n’y avait pas de droit d’auteur. Ce qui représente un avantage considérable. Alors, même quand on travaillait sur d’autres projets, on continuait à jouer Mélange caustique. Nous avons présenté ce duo une quinzaine de fois. Jusqu’en 2015. Nous avons même eu l’occasion d’aller nous produire dans une petite salle à Paris.
Quelle qualité te semble la plus importante quand on est président d’une troupe de théâtre ?
L'écoute : être tourné vers les autres. Pendant les réunions administratives ou lors de l'assemblée générale, j'aime exposer le projet, écouter un peu tout le monde, essayer de synthétiser les avis. Il faut essayer de trouver un consensus. Moi aussi, je m'exprime évidemment. Je donne mon avis mais mon point de vue n’a pas plus de valeur que celui d’un autre membre.
Nous fonctionnons en démocratie participative. Tous les adhérents ont accès à la messagerie et peuvent envoyer des emails au nom de l'association. On veille aussi à être totalement transparents sur les questions de comptabilité. Nous nous organisons en commissions pour répartir les responsabilités (entre autres : la communication, les costumes, les décors). Je représente parfois l’association dans les réunions à la mairie mais pas systématiquement : ça peut être quelqu'un d'autre. La rédaction des comptes-rendus, c’est moi qui m’y colle. Mais ce n’est pas un problème parce que j'adore ça. Je synthétise les discussions (en essayant de mettre un peu d'humour) : cela permet à ceux qui étaient absents d’être informés. En fin de compte, la communication, que ce soit à travers les comptes-rendus en interne ou les affiches, cela fait aussi partie de la vie d’une troupe de théâtre amateur.
Es-tu parfois tenté par le rôle de metteur en scène ?
Pas tellement : j'aime trop monter sur scène. Nous avons parfois créé des spectacles où la mise en scène était collégiale. Dans ces cas-là, j'aimais bien donner mon avis mais nous avons constaté que c'était moins efficace : il vaut mieux dédier ce rôle à une personne.
Quelles sont, pour toi, les grandes distinctions entre théâtre professionnel et théâtre amateur ?
Bien sûr, les comédiens professionnels ont suivi une formation. Ce qui n’est pas le cas des comédiens amateurs. Mais la formation n’est pas tout, il y a aussi le talent, quelque chose d’inné qu’on trouve aussi parmi les amateurs. Ce qui nous différencie également, ce sont les budgets en jeu. Le théâtre est un gagne-pain pour les professionnels alors que chez les amateurs, c’est juste une passion : il y a tout de suite moins de pression.
Est-ce que Le Théâtre Arrive collabore avec des acteurs du secteur professionnel ?
Chez nous, il n'y a pas de professionnel. Pascal assume le rôle de metteur en scène parce qu'il est expérimenté mais il n'est pas rémunéré. Nous aimerions proposer à certains membres de suivre une formation auprès d’un professionnel, que ce soit pour la sonorisation ou la régie. On a prévu une enveloppe budgétaire mais cela ne s’est pas encore concrétisé.
Qu’est-ce qui t’a amené au théâtre amateur ?
Dès que j'ai su écrire, j'ai inventé plein d'histoires. Pour mon plaisir personnel d’abord et puis pour les lire à mon petit frère. Quand on voyait nos cousins, on créait des petits spectacles ensemble.
Aujourd’hui encore, j'aime bien mettre en scène les petits moments du quotidien. Quand je suis avec mes enfants, je fais dialoguer les objets, j’imagine des trucs un peu fous-fous. On dirait bien que ça se transmet. Ma fille danse tout le temps, elle s'exprime beaucoup corporellement. Mon fils aussi est très créatif : il aime inventer des jeux.
Comme beaucoup, j’ai fait un peu de théâtre au collège. On lisait un dialogue en classe ou on montait des petits spectacles. Quand je suis entré en école d'ingénieur, à 20 ans, je me suis inscrit dans le club de théâtre à Grenoble et c'est là que j'ai commencé à faire du théâtre de façon plus structurée, en rejoignant une troupe qui montait de vraies pièces.
En cette période de crise, comment vois-tu évoluer la pratique du théâtre amateur ?
Les crises sont fréquentes dans une troupe de théâtre amateur. Un comédien qui vous plante un mois avant de jouer, une salle qui n'est plus disponible à l’approche d’un spectacle… A chaque fois, c’est un coup dur pour la motivation au sein du groupe.
Cette fois, c'est pareil mais évidemment c'est plus long. il faut que le groupe reste mobilisé et ce n'est pas seulement l'affaire du président mais de l'ensemble du groupe. Notre atout c'est le côté convivial de la troupe : le fait que l'on se retrouve non seulement pour faire du théâtre mais aussi pour manger un bout ensemble. Et en même temps, on partage l’objectif de faire les choses bien, de faire en sorte que chacun participe à la vie de la troupe et puisse s'exprimer. Je suis très fier de cela. C’est grâce à ça, je pense, qu’on arrive à surmonter toutes les crises, même lorsque des adhérents nous quittent, par démotivation ou à cause de problèmes personnels à régler. Du coup, ne restent que ceux qui sont à fond dans le théâtre, qui partagent l’envie de proposer des choses qui ont de la gueule tout en s’amusant.
Des spectacles de qualité, des mises en scène élaborées tournée vers le public. Ça ne nous intéresse pas un théâtre prétentieux, où les comédiens se regardent le nombril. On est dans la comédie. J’aime bien faire passer des messages sérieux bien sûr, mais toujours en rigolant.
Propos recueillis par Jérémie Brasseur
Pour découvrir le site web de la troupe : www.letheatrearrive.com