Faut pas draguer !

Faut pas draguer !

Joseph Cau

Joseph Causéquence 01

Lui. – Maa oui qué tou mé connais… Maa c’est moi, Tonio Gustavio Verdi ! Jé souis lé plous bello, eh… Jé souis céloui qui té fait mal aux yaux quand tou mé régardes ! Hmm, jé vois ahossi qué tou ne sais plous respirer. Maa ch’est normalè ! Ferme les zouyeux, jé va té faire lé boca boca.

Il veut l’embrasser. Elle lui colle une baffe.

Elle. – Mais ça ne va pas, non ! T’es un rapide, toi… TGV, va !

Lui. – Maa qué, « TGV » ? Jé m’appellé Tonio Gustavio Verdi.

séquence 02

Lui. – Pardon, mademoiselle. Pouvez-vous m’indiquer la rue T’es-bonne-toi Straat ?

Elle. – Bien sûr, Monsieur. Prenez la deuxième à gauche après l’avenue Connard-Laan et arrêtez-vous au feu Va-te-Faire-Mettre-Profond : vous y êtes !

séquence 03

Lui, chantant Dany Brillant. – « Quand je vois tes yeux, je suis amoureux / Quand j’entends ta voix, je suis fou de joie / Quand je vois tes yeux, je suis amoureux / Quand j’entends ta voix, je suis fou de toi… »

Elle, chantant Daniel Guichard. – « Mais sèche un peu tes yeux / Et ne crois pas surtout / Que nous autres on s’en fout / Tu sais, pleurer ça sert à rien / Laisse un peu dormir ta peine / Dans un coin. »

Lui. – Bon, OK ! C’est pas encore aujourd’hui que je vais conclure.

séquence 04

Ils dansent.

Lui, se trémoussant. – Tu sais, tu ne le sais pas encore mais c’est aujourd’hui que ton avenir se dessine ! Tu es sur le point de changer ta destinée. Saisis ta chance sans hésiter… Elle ne repassera pas ! (À son oreille :) Ne le dis à personne mais j’ai un don pour ça.

Elle, continuant à danser. – Quelle chance que j’ai ! J’ai toujours eu beaucoup de chance et te voilà, toi, la lumière de ma vie, la prunelle de mes yeux. Mais dommage…

Lui. – Comment ça, « dommage » ?

Elle. – Mais oui ! Dommage que ton don ne t’a pas fait voir mon copain qui va te mettre la tête au carré !

séquence 05

Lui. – Quand j’étais petit, j’étais tellement beau que toutes les nounous étaient folles de moi. Elles m’appelaient ZouzouMon petit Zouzou.

Elle. – Oui, je sais, j’ai entendu parler de toi mais…

Lui. – J’ai grandi et ma beauté en a ébloui plus d’une. Elles ont toujours été folles de moi. C’est naturel chez moi. Va savoir pourquoi ! Une bonne étoile, peut-être ?

Elle. – Oui, ça aussi j’en ai entendu parler mais…

Lui. – « Mais… », « mais… » Comment ça, « mais… » ? Que cherches-tu à me dire ?

Elle. – Ta beauté s’est arrêtée à ton nombril et maintenant je sais pourquoi elles t’appellent toutes Petit zizi.

séquence 06

Lui, frappant à la vitrine. – C’est combien ? (Il frappe trois fois.)

Elle, montrant trois doigts. – C’est trois cents.

Lui. – Ouah ! C’est cher !

Elle. – Peut-être, mais c’est du double-vitrage !

séquence 07

Lui. – Je vois que vous êtes très en forme aujourd’hui. Ne soyez plus impatiente, je suis là pour tous vos désirs.

Elle. – Tiens donc ! Et qu’est-ce qui vous émoustille de la sorte ?

Lui. – Eh bien, si ça ce n’est pas un signe : avoir sa petite culotte sur sa cheville !

Elle. – Espèce de sale goujat ! (Elle lui colle une baffe.) C’est un bandage : je me suis tordu la cheville ce matin.

séquence 08

Ils sont bras dessus, bras dessous.

Lui. – J’ai vu beaucoup de pays. Celui qui m’a le plus marqué, c’est le Brésil : ce sont tous des joueurs de foot et des prostituées !

Elle, fâchée. – Eh, le globetrotteur, je suis Brésilienne !

Lui. – Ah oui ? Quelle coïncidence ! Dans quelle équipe de foot tu jouais ?

séquence 09

Lui. – Dans tes yeux, il y a tant de soleil ; quand tu me regardes, je bronze...

Elle. – Tu ne risques pas une insolation : en bégayant comme tu le fais, tu t’inondes de postillons !

séquence 10

Lui. – I had a dream ! Cette nuit, j’ai fait un rêve merveilleux ! J’ai rêvé de toi.

Elle. – Grand fou, va ! « De moi » ! Et comment ça ?

Lui. – J’ai rêvé de ton corps. Je marchais les pieds nus sur un océan de seins. Un océan de tes seins !

Elle. – Eh bien, j’espère que tu sais nager parce que je fais du 75 A !

août 2020